Prologue - Léana

“Déjame decirte que lo tengo todo y no es lo que quiero

No quiero, no quiero”

Déjame decirte – Eva Ruiz

    Multimillionaire. Tout sauf aimée de mes parents. Élève modèle. Fille parfaite et attentionnée. Voilà ce que je suis, voilà à quoi se résume ma vie déjà tracée. On ne se soucie pas de ce que je pense, ni même de la personne que j’aimerais être. De ce que je ressens au plus profond de moi et que je cache loin des regards, à l’abri de tout jugement. Il n’y a que des objectifs que l’on souhaite que j’atteigne, sans se soucier de comment je les atteindrais. Des vœux que je n’ai jamais vraiment formulés.

    Beaucoup de personnes pensent que j’ai une vie de rêves, facile, pleine de moments d’insouciance, mais ils ne peuvent que le supposer, car ils ne savent pas tout ce qu’il se trame une fois à l’abri des regards. Entre mes parents et moi, derrière des murs.

    Amoureuse. Voilà ce que j’aimerais devenir. Mais, avec des parents qui ne cessent de me suivre partout, de contrôler mes faits et gestes au centimètre près, difficile de rencontrer quelqu’un qui n’ait pas pitié de moi…

    J’aurais tout donné pour que mes parents viennent à un de mes anniversaires quand j’étais petite. Mais l’argent, Léana. L’argent avant tout. J’ai l’impression qu’ils pensaient ceci à chaque fois que je leur posais la question. Avec un regard plein d’une “désolation” sans regrets, comme seuls les parents savent le faire. J’ai fini par comprendre. Ils ne m’accorderaient jamais assez de temps.

    Mais, est-ce qu’ils s’aiment réellement ? Un mariage pour de l’argent. Je pense que c’était ça. À moins qu’ils… appellent “amour” le sentiment froid qu’ils partagent et ressentent mutuellement ? Et… ils n’ont sûrement pas eu une fille pour le plaisir. Peut-être pour qu’elle hérite de leur importante fortune, celle qu’ils auront amassée au fur et à mesure de leur vie, le résultat du “dur » labeur qui leur aura pris tant de temps…

    Mais… avec des si, facile de refaire le monde…

    Si mes parents avaient été plus compréhensifs, je ne serais pas du tout la même personne, aussi déterminée et battante…

    Si mes parents avaient été moins obnubilés par l’argent, ils m’auraient accordé plus de temps…

    Éprouveront-ils un jour le moindre sentiment à mon égard ? De la fierté, de la tristesse ? Ou même… de l’amour ?

    Je préfère ne pas me faire d’illusions. Ils n’ont jamais rien ressenti et ce n’est pas près de changer.

    À vrai dire, moi non plus, je ne ressens pas grand-chose pour eux. Ce ne sont que mes parents, ni plus, ni moins. Non ?

    Et notre relation n’est pas près de changer.

    Tout comme ma vie.